Biographie
Clotilde Scordia
1874
Adolphe Jules Pétérelle naît le 26 juin à Genève dans le quartier des Eaux-Vives. Son père, Martin Peterelli et sa mère Marceline Dubois, originaires de Savognin (canton des Grisons), sont installés à Genève depuis 1873. Le couple avait quitté Paris en 1871 lors de la Semaine sanglante.
1876
Adolphe Pétérelle perd sa mère. Son père, cherchant une mère de substitution le confie à une voisine, Mme Lhuillier. En réalité, le jeune Adolphe est livré à lui-même et passe ses journées à flâner.
1881
Son père Martin confie son fils à sa tante.
1886
Il découvre l’enseignement à l’école des Beaux-arts de Genève où il rejoint l’atelier de dessin et de peinture.
1891
Adolphe Pétérelle a dix-sept ans et décide de s’émanciper. Il quitte sa tante pour Paris. Sa soif de liberté et d’aventure reste intacte. À Paris, il part à la recherche de ses anciens camarades afin de trouver de l’aide pour subvenir à ses besoins vitaux. Quelques ateliers de peinture acceptent de l’engager pour la réalisation de décorations. Mais sa vie quotidienne se résume à l’errance dans les rues de Paris où il croque ce qu’il y découvre mais les couleurs nécessaires sont chères pour transformer croquis en peinture.
1898
Adolphe Pétérelle s’établit à Montmartre, 82, rue Caulaincourt, muni d’une lettre de recommandation à l’intention du peintre animalier Henri Deluermoz (1876-1943). Deluermoz lui offre alors de partager son atelier. Pétérelle y travaille à la réalisation d’un panneau décoratif pour un chantier de Sarreguemines. Les deux jeunes peintres vivent sans le sou. Un troisième artiste vient régulièrement les retrouver à l’atelier, le sculpteur François Cogné (1876-1952). Les trois amis surnommés les « Trois Mousquetaires » (selon le témoignage de Charles Lombard) partagent les virées où chacun croque ce qu’il voit de son côté. Ils fréquentent également, Théophile Steinlen, Adolphe Willette, Aristide Bruant… Tout ce petit monde fréquente l’atelier du Cat’s Cottage au 13, rue de Ravignan. Décès de son père Martin.
1900
Contraint de quitter Paris, Henri Deluermoz rend son atelier, obligeant Pétérelle à déménager au sommet de la Butte, place Ravignan, aujourd’hui place Émile-Goudeau. C’est dans une singulière bâtisse qui sera connue sous le nom de Bateau-Lavoir que Pétérelle prend un atelier. Il s’y lie d’amitié avec le peintre catalan Joaquím Sunyer y Miró (1874-1956). Pétérelle débute sa collaboration (jusqu’en 1904) avec les établissements Hippolyte Boulenger (Faïenceries de Choisy-le-Roi) en tant que décorateur de poteries. Il y fait la connaissance d’Émile Lenoble, fournisseur de dessins à la faïencerie.
1908
Adolphe Pétérelle quitte Montmartre pour l’autre poumon artistique parisien, Montparnasse, où il loue un atelier 11, Cité Falguière. Il y a pour voisins, Amedeo Modigliani (au numéro 14), Constantin Brancusi (impasse Ronsin), Mateo Hernandez (numéros 9 et 11), le sculpteur Joseph Bernard (trois ateliers au 7) qui viendra travailler aux côtés de Pétérelle dans son atelier sur le thème de la danse.
1913
La galerie L’Encrier organise la première exposition personnelle d’Adolphe Pétérelle.
1914
À la déclaration de guerre en août, Pétérelle s’engage le 9 septembre dans la Légion étrangère. Il rejoint le front avec le trentième régiment d’infanterie.
1915
Adolphe Pétérelle se trouve dans la Somme quand le 11 février, à Frise, il est enseveli avec lors de l’explosion d’une mine. Il en ressort presque aveugle et est envoyé à l’hôpital auxiliaire de Saint-Brieuc où il sera soigné ; il craint de ne pouvoir revoir les couleurs. Réformé le 20 avril, il est naturalisé français le 11 décembre et francise son patronyme en Pétérelle. C’est alors son retour à la vie civile et à la Cité Falguière.
1916
Adolphe Pétérelle fait la connaissance d’Agnès Champagnac.
1919
Adolphe Pétérelle épouse Agnès le 25 septembre à la mairie du 17e arrondissement de Paris. Le couple s’installe dans l’atelier de la Cité Falguière.
1920
Le couple accueille au mois de juillet son premier enfant, Bernard. Plus de dix ans auparavant, Adolphe Pétérelle avait eu deux enfants de sa compagne de l’époque.
1921
La naissance de Bernard rend difficile la vie et le travail dans l’atelier de la Cité Falguière, aussi la famille Pétérelle s’installe-t-elle faubourg Saint-Martin et Adolphe Pétérelle continue de se rendre chaque jour à son atelier.
1922
Expose au Salon des Indépendants dont il est sociétaire. Il devient également sociétaire des Amis de Montparnasse.
1923
Il expose au Salon d’Automne, Deux nus.
1924
En juin, naissance du second enfant du couple, Marceline dite Linette.
1926
L’artiste Élisabeth Fuss-Amore, qui souhaite présenter au public et faire juger par la critique le travail de Pétérelle, organise une exposition de ses oeuvres dans le café Le Petit Napolitain à Montparnasse. Les retours prouvent que le travail de l’artiste ne laisse pas indifférent. Certains parlent de ces peintures comme étant l’oeuvre d’un « génie » tandis que d’autres y voient celle d’un « fou ». Les marchands prennent alors le chemin de l’atelier de Pétérelle.
1927
Deux expositions personnelles de Pétérelle sont organisées, la première en mai à la galerie Terrisse. Les oeuvres connaissent un grand succès et on lui propose un contrat d’achat de son fonds d’atelier. Pétérelle refuse. La seconde exposition se tient à la galerie d’art du Montparnasse, le catalogue est préfacé par Robert Rey, conservateur adjoint du musée du Luxembourg. Cette exposition d’environ 70 pièces est un nouveau succès. Son ami François Pompon est le premier à acquérir une oeuvre, un petit portrait de femme.
Après cette dernière exposition, Pétérelle accepte le contrat de trois ans proposé par Jean Charron, co-directeur avec R. Bardey de la galerie d’Art du Montparnasse.
1928
Pour la première fois, une oeuvre de Pétérelle est adjugée aux enchères le 9 juin, pour la somme de 3 650 francs de l’époque, par Maître Bellier, sur expertise de Jos Hessel. La famille passe ses vacances d’été à Delincourt dans le Vexin. Il participe également à la 6e exposition du Salon des Tuileries dont le sculpteur Robert Wlérick (1882-1944) est l’un des fondateurs. Selon les propos rapportés à Claude Raphaël-Leygues par son fils Gérard, Robert Wlérick n’admirait que deux peintres : « d’abord Dufresne1 que vous connaissez sûrement, et aussi Pétérelle que vous ne connaissez sûrement pas2 ».
1929
La galerie d’art du Montparnasse présente des peintures récentes de Pétérelle (novembre-décembre).
1930
Pétérelle ne renouvelle pas le contrat qui le lie avec la galerie d’art du Montparnasse préférant garder son indépendance. Jean Charron continuera d’acheter ses oeuvres. La galerie Georges Bernheim présente une exposition personnelle de l’artiste en décembre. La critique Fanny Clair écrit dans Le Soir : « Pétérelle, un très grand peintre. L’éloge n’est point de trop. Enfant du Siècle, allez en juger ». En avril, l’hôtel Drouot adjuge pour 7 800 francs une oeuvre de Pétérelle provenant de la collection Fiquet, sur une expertise de Schoeller et Fabre. Cette adjudication est la plus élevée de la vente.
1932
Le médecin obstétricien Louis Cleisz commande à Pétérelle la réalisation de fresques pour sa salle à manger. Edmond Frapier édite l’album Fresques dans sa galerie des Peintres-Graveurs, qui contient dix épreuves originales numérotées avec une suite en deux états pour le quart du tirage limité à 100. L’album rend hommage à l’hôpital Saint-Louis.
1933
Pétérelle reçoit la médaille d’or à l’Exposition coloniale de Marseille. Lumière et Ténèbres, est offerte par l’Association des amis des artistes vivants au musée du Luxembourg. Découverte de la Bretagne.
1936
À la galerie Rive-Gauche, exposition de peintures et de dessins sous l’égide de Pierre Darras, directeur de l’École des Beaux-arts de Paris.
1938
Exposition personnelle en novembre à la galerie Charpentier ; Pétérelle est fait chevalier de la Légion d’honneur.
1939
La déclaration de guerre du 3 septembre oblige Adolphe Pétérelle, sa femme et ses enfants à quitter Grand- Bréau pour rentrer à Paris. Ils se rendent ensuite à Nantes où ils s’installent 1, place de la Monnaie. Adolphe Pétérelle réussit à se faire engager comme gardien de la succursale bretonne de la société où travaille son fils. Cet emploi alimentaire ne l’empêche nullement de travailler puisqu’il continue de dessiner et de découvrir la ville. Grâce à son collectionneur Paul Besnard, il est également en charge de la décoration d’une mairie bretonne.
1940
Jean Charron organise une exposition d’oeuvres à la librairie Fleury, boulevard Saint-Germain à Paris. L’État qui lui commande la réalisation de deux fresques sur toile destinées à l’École des Mines de Saint-Étienne l’inspire à témoigner de la vie des « gueules noires » dans les mines. Pour la réalisation de sa première fresque, il choisit Couriot, le plus grand site du bassin charbonnier stéphanois. Il expliquera à Robert Rey : « C’est curieux, pour descendre dans la mine, tu commences par monter dans un univers à claire-voie de cornières, de câbles, de parquets d’acier. Du fer et du ciel. Et, de là, tu tombes dans le trou ». Il réalise tout un ensemble de croquis qui serviront d’études pour des toiles futures. En août, l’armistice signé, la famille Pétérelle quitte Nantes et rentre à Paris.
1942
La galerie Charpentier l’invite à son exposition « Le Paysage français de Corot à nos jours » où il présente un paysage ; puis à l’initiative de Jean Charron, la galerie de France consacre ses cimaises à une exposition de peintures de Pétérelle (novembre-décembre). Le collectionneur Charles de Saint-Denis acquiert une cinquantaine de toiles de Pétérelle. Son fils Bernard est réquisitionné pour le S.T.O. jusqu’à la fin de la guerre.
1944
À la suite d’une hémiplégie partielle, Pétérelle se voit contraint de peindre de la main gauche.
1946
Sa santé déclinant, il est obligé d’arrêter de peindre en juillet.
1947
L’État acquiert les deux fresques sur le monde minier réalisées en 1940, aujourd’hui conservées au Centre national des arts plastiques. Le 27 octobre, Adolphe Pétérelle meurt à Paris.